Les chroniques de Chaoran - Livre II

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La formule

Alors que l'enfer se déchainait sur eux, Ars et Nemor aperçurent un gros rocher qui trônait fièrement au milieu de la plaine. Ils s'abritèrent derrière afin d'élaborer un plan pour se sortir du pétrin, chose qu'ils firent avec brio grâce à leur incomparable expérience en la matière. Mais ils ne pouvaient pas rester sur un échec, leur honneur et leur réputation étaient en jeu... ainsi qu'une formule valant plusieurs dizaines de milliers de pièces d'or, ne l'oublions pas. Ils revinrent donc au manoir à la nuit tombée et s'infiltrèrent une nouvelle fois dans le laboratoire. Ils trouvèrent Valion en plein travail, et profitant de la surprise, parvinrent à le tuer. Non sans mal, je vous l'assure mes chers enfants. Sur son cadavre encore fumant, ils récupérèrent 2 parchemins. L'un était tracé de runes antiques très intrigantes que non amis prirent pour la formule, l'autre était un banal sortilège que Nemor rangea avec les siens à tout hasard. C'est alors qu'ils se firent attaqués par Konrad. Exténués par leur combat contre Valion, Ars et Nemor durent se résoudre à laisser leur ennemi s'enfuir avec leur précieux trésor, en se jurant de se mettre à sa poursuite dès le lendemain.

Quelques jours plus tard, nos amis étaient de retour à Portimao sur les traces de Konrad. Malheureusement, c'est son cadavre qu'ils trouvèrent enfin, au fond d'une ruelle sombre et crasseuse, un long poignard planté entre les omoplates. A côté de sa dépouille, ils trouvèrent le parchemin couvert de runes à demi calciné. Oui Konrad était mort de la main des assassins de la guilde, et nos compères étaient furieux de ne pas l'avoir étripé eux mêmes. Les hommes de la guilde leur apprirent qu'il avait tenté d'arnaquer la guilde en lui vendant un parchemin sans valeur. Le doute assaillit soudain nos amis : si Konrad n'avait pas volé la formule, où pouvait-elle bien être ? Après plusieurs jours d'investigation, Nemor découvrit que la formule était en fait cachée dans le second parchemin qu'ils avaient trouvé sur le corps de Valion, et qu'ils avaient prit pour un banal sortilège magique. Et oui mes chers enfants, en fait Ars et Nemor était en possession de la formule depuis le début, mais ils ne s'en doutaient pas. Valion était vraiment un mage très ingénieux, vous ne trouvez pas ? Bref, après un décodage laborieux, Nemor retranscrit une bien curieuse énigme cachée au milieu des signes magiques :

A la lueur chrysocale
Vous briserez le cœur d'or en morceaux
La morsure de l'acier sur la chair innocente
La vie du ver en cadeau
Jusqu'à la flamme incandescente

Mais il est une chose primordiale
Vous n'accomplirez le réveil
Que dans les hauts qui portent son nom
La métempsycose en vermeil
N'est jamais accomplie sans une bonne raison


Nouveaux alliés, nouveaux ennemis

Par une fraîche nuit de printemps, alors qu’Ars et Nemor bivouaquaient au milieu de la forêt, ils furent attaqués par une bande d'orques surarmés, surentrainés, et surtout bien supérieurs en nombre. Au moins quatre ! A leur tête se trouvait une ensorceleuse humaine, qui leur apprit que Valion avait inventé la formule à sa demande, et qu'elle souhaitait reprendre son bien. Sous peine de mort atroce, cela va de soi. Après un rude combat, nos deux voleurs parvinrent à s'enfuir dans la forêt. La sorcière hurla qu'elle les retrouverait où qu'ils se cachent, puis elle vociféra des menaces de morts et de torture en tout genre, mais nos amis était déjà trop loin pour les entendre.

Par cette même fraîche nuit de printemps, Lamion, druide demi-elfe de son état, suivait la trace d'une bande d'orques qui avaient pénétré dans sa forêt en faisait fi de son environnement et de sa tranquillité. Son fidèle compagnon, un magnifique tigre blanc dont le nom m'a toujours échappé, flaira l'odeur de nos deux compères, qui se jetèrent tête baissée dans l'embuscade que leur tendit le druide. Décidément, ce n'était vraiment pas leur jour. Après quelques pourparlers, il s'avéra que Lamion et nos deux aventuriers avaient les mêmes intérêts. Ars et Nemor invitèrent donc le druide à se joindre à eux. Lamion leur expliqua que l'ensorceleuse se nommait Lissia, et que son dernier crime en date était d'avoir vidé de son sang un paladin de Tyr l'avant veille. Mais quel était donc le rapport entre ce paladin et la formule ?

Après avoir travaillé plusieurs jours d'affilé sur le décryptage de l'énigme de la formule, nos trois nouveaux amis décidèrent qu'il était temps d'aller se dégourdir un peu les pattes. Il ne faut pas oublier que l'épée d'un aventurier rouille si elle n'est pas abreuvée régulièrement de sang de gobelins ou autre créatures nuisibles. Ils partirent donc explorer les marais au nord de l'île à la recherche du repère d'un dragon noir qui y sommeillait depuis quelques centaines d'années. Ils pénétrèrent dans l'antre du dragon et le trouvèrent endormi sur un énorme tas d'or. Un malicieux plan d'attaque fut élaboré : Nemor envoya une boule feu vers le plafond au dessus du dragon endormi pendant qu’Ars et Lamion se précipitaient sur les trésors. Malicieux n’est-ce pas ?

Une énorme masse de pierres et de sable s'écrasa sur le pauvre dragon qui dormait tranquillement et qui ne demandait rien à personne. Au moment où Lamion ramassa un gros sac remplit de pierres précieuses, une énorme queue écailleuse sortit de sous les décombres et le frappa droit dans les... enfin là où ça fait mal. Ars se jeta sur une monstrueuse patte griffue que le dragon venait de dégager et frappa, frappa encore et encore si bien qu'il arracha un de ses orteils. Le monstre, hurlant de douleur et de frustration, se redressa de toute sa taille, faisant voler des pierres et de la poussière dans toute la caverne. Ses narines fumaient, son regard était terrifiant, de sa gueule sortait des vapeurs acides et suffocantes. Il déploya majestueusement ses ailes, remplissant ainsi presque tout le volume de la grotte.

Lamion hurla de terreur et s'enfuit en courant. Nemor resta pétrifié de peur et commença à pleurer en appelant sa mère. Ars s'enfuit lui aussi, mais il eu la présence d'esprit d'attraper Nemor par le col et de l'entraîner vers la sortie. Ils se perdirent dans les galeries souterraines, là où le dragon ne pouvait pas les suivre. Ils trouvèrent la sortie et reprirent la route de la ville en se jurant de ne parler de ça à personne. Le bon côté de la chose, c'est que grâce au doigt qu'ils avaient récupéré dans leur retraite, ils étaient maintenant en possession d'un bon litre de sang de dragon noir, aux propriétés magiques plus qu'intéressantes. Le mauvais côté, c'est que le lendemain, une rumeur se répandait dans toute l'île : le dragon noir des marais s'était réveillé pour des raisons inconnues, il était très énervé et commençait à tout dévaster sur son passage, menaçant de mettre l'île à feu et à sang. Et oui mes enfants, en jargon d'aventurier, ça s'appelle faire une boulette...


Le rituel

Après l'épisode quelque peu chaotique du dragon noir, nos trois aventuriers décidèrent qu'il était plus prudent de ne pas se faire remarquer pendant quelques temps. Alors que l'armée du roi partait dans le nord combattre le dragon, ils s'attelèrent à une autre lourde tâche : résoudre l'énigme qui leur permettrait de transformer n'importe quel métal en or. Je vois vos yeux briller mes enfants, les leurs brillaient encore plus lorsqu'ils ont trouvé.

Un soir dans une auberge, Ars fit la connaissance d'une jeune servante qui tomba amoureuse de ce beau guerrier à la crinière dorée, et qui décida d'accompagner le groupe. Le lendemain, ils tombèrent à nouveau dans une embuscade tendue par Lissia l'ensorceleuse, qui avait échangé sa horde d'orques contre un commando de gnomes ninja. Heureusement, la jeune servante avait temporairement convertit Ars à la non violence, et, une fois n'est pas coutume, nos héros négocièrent. Lissia leur expliqua que la formule servait à créer de l'or bleu, un métal qui n'existait pas, et que Valion avait inventé. Elle en avait besoin pour fabriquer une coupe afin d'accomplir un rituel magique. Nos amis furent donc d'accord pour lui fabriquer sa coupe, à condition qu'ils puissent garder la formule ensuite.

Ils se rendirent donc tous au sommet du mont du réveil et attendirent le coucher du soleil (la lueur chrysocale dans les hauts qui portent son nom). Puis Ars se saisit de son amoureuse transie et l'attacha à un rocher pendant que Nemor lui tranchait la gorge (le cœur d'or brisé en morceaux et l'acier sur la chair innocente). Puis Lamion versa le sang du dragon noir sur le cadavre de la malheureuse (la vie du ver en cadeau). Lorsque le dernier rayon du soleil éclaira la scène macabre, le sang s'embrasa instantanément, faisant naître des flammes s'élevant à plusieurs mètres de hauteur. Lissia jeta une coupe en acier au milieu du brasier. Quelques minutes après, les flammes disparurent, laissant place à une magnifique coupe en or aux reflets bleutés qui trônait au milieu des restes calcinés de la jeune fille. Lissia s'en saisit, un large sourire illuminait son visage.

C'est alors qu’Ars, Lamion et Nemor entrèrent en action. Et bien quoi mes enfants ? Vous vous imaginiez qu'ils laisseraient un vase en or-bleu leur échapper ? Ars chargea les ninjas en beuglant, Lamion et son tigre féroce se jetèrent sur Lissia pendant que Nemor tentait de subtiliser la coupe. L'ensorceleuse était sur le point de passer un très mauvais quart d'heure, quand soudain elle disparu dans un éclair bleu. Avec la coupe évidement, sinon c'eu été trop facile pour nos héros. De rage et de dépit, nos trois héros frustrés se vengèrent sur les gnomes, qu’ils taillèrent en pièce, éviscérèrent, brûlèrent, et empalèrent sur des troncs d'arbres au sommet de la montagne en guise d'avertissement. Un avertissement à quel sujet, ça ils n'ont jamais vraiment décidé, en tout cas c'était un avertissement…


Le temple oublié

Les choses allaient plutôt mal pour nos héros. Pour le moment on ne peut pas dire qu'ils nageaient dans le succès. Il fallait y remédier rapidement, leur réputation d'aventurier en dépendait. Avant d'empaler le dernier gnome ninja, Ars avait usé de tout son charme agressif et barbare pour lui arracher l'endroit où Lissia allaient accomplir son rituel : l'ancien temple du dieu Baine. Jadis c'était une énorme forteresse qui se dressait au centre de l'île, et la légende disait qu'il y avait tellement de corbeaux et de vautours tournoyant au dessus du donjons pour se nourrir des cadavres pendus aux remparts que jamais le soleil n'éclairait ses murs noirs. C'est terrifiant n'est-ce pas mes chers disciples, moi aussi j'en frissonne. Aujourd'hui le temple n'est plus qu'un tas de pierres en ruine. Après avoir éliminé quelques gardes et exploré les décombres, nos trois gaillards trouvèrent un escalier qui descendait dans les profondeurs de la terre. La peur des escaliers est assez courante chez les aventuriers, mais ils n'écoutèrent que leur courage et s'élancèrent dans le tunnel sombre et humide.

Ars, Lamion et Nemor explorèrent moult tunnels et souterrains à la recherche de Lissia. Ils croisèrent quantité de statues démoniaques, de stèles couvertes de runes antiques très puissantes, de squelettes reposants dans des positions bizarres, et même un énorme sarcophage que des ouvriers gobelin étaient en train de déterrer. Mais leur objectif était de tuer Lissia, le reste ne valait pas le coup qu'on s'y attarde, peu importait ce que faisaient des gobelins trouillards avec un sarcophage démoniaque dans les ruines d'un temple vieux de mille ans.

Finalement, au détour d'un couloir, ils déboulèrent dans une grande caverne éclairée par des torches au centre de laquelle, Lissia supervisait la réalisation que ses sombres et mystérieux projets. Alors que la sorcière regardait ailleurs, nos courageux et loyaux héros attaquèrent sans sommation. Lamion déchaîna la furie de ses animaux familiers sur l'ensorceleuse, tandis que Nemor faisait pleuvoir du feu sur ses gardes du corps. Ars brandit son épée et chargea en hurlant comme à son habitude. Le combat fut bref. Prise de court et privée du soutient de ses hommes, Lissia ne put tenir que quelques secondes face à rage meurtrière et dévastatrice de ses trois adversaires. Enfin, elle tomba sous les coups, non sans avoir proféré de terribles menaces de morts sur ses bourreaux en expirant un cinglant "je reviendrai..." juste avant de rendre son dernier souffle.

Une fois de plus, la stratégie la plus simple et la plus directe avait payé. Ars, Lamion et Nemor étaient enfin victorieux! Après avoir dépouillé tous les cadavres, heu je veux dire les fouiller pour s'assurer qu'il n'y avait plus rien de dangereux ou de démoniaque, nos trois filous se partagèrent équitablement le butin et se mirent en quête d'une bonne taverne afin de s'en jeter un petit et de pouvoir raconter leur fabuleuse épopée à qui voudrait bien l'entendre. Je peux voir la joie et l'allégresse dans vos yeux mes chers disciples, oui nos héros s'en sont sortit, je vous conterai donc la suite de leur histoire la semaine prochaine.

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